Aujourd’hui, c’est le climat qui fait parler de lui : parce qu’il impacte directement le quotidien de chacun, mais aussi le futur de tous. Cette question de l’avenir de la planète est dans tous les esprits. Et elle concerne également la nutrition, qui devient indissociable du climat. Climat et nutrition sont interconnectés !

En effet, nos choix alimentaires exercent une influence sur le changement climatique et les conséquences de ce dernier modifient nos façons de consommer et de produire. Toutes les parties prenantes sont concernées – laboratoires de compléments alimentaires, industriels de l’agroalimentaire, acteurs de la restauration collective… – avec la mise en place d’actions concrètes sur les leviers climat et nutrition pour faire face à l’urgence climatique.

Climat et nutrition : la nécessité d’une prise de conscience

  • La nutrition influence le climat
    • Aujourd’hui, le changement climatique nous concerne tous. Selon la définition de l’ONU, il se manifeste par des « variations à long terme de la température et des conditions météorologiques ». Des variations qui sont dues notamment aux émissions de CO2 ou de méthane (gaz à effet de serre), qui proviennent en grande partie de notre système alimentaire. On considère que 24 % de l’empreinte carbone des ménages en France viennent de l’alimentation, avec la production agricole en premier poste et le transport en second[1]. L’empreinte carbone globale du secteur est évaluée à plus de 160 millions de tonnes d’équivalent CO2 par an.
    • Avec une prévision de 9,7 milliards d’individus en 2050[2], un des enjeux sociétaux est de nourrir tous les individus durablement. Pierre Rhabi, un des pionniers de l’agroécologie, déclare que « l’agriculture n’est pas faite pour produire » mais qu’elle « est faite pour nourrir ».
    • La question de la gestion des ressources alimentaires s’impose alors aujourd’hui à nous, tout en favorisant des modèles agricoles plus durables.
    • Au regard de ces chiffres, il est indéniable que l’alimentation au global et donc la nutrition influence le climat.

 

Cette image est un graphique illustrant l'empreinte moyenne en France en 2019, qui est de 9,9tCO2eq/personne

 

  • Le climat influence la nutrition
    • Réciproquement, le climat influence également notre manière de s’alimenter et de produire. Avec de plus en plus de catastrophes climatiques visibles, les consommateurs prennent conscience que leurs choix alimentaires sont un levier d’action pour soutenir la planète. Sécheresses, pénuries d’eau et déclin de la biodiversité ne sont qu’une petite partie des conséquences du changement climatique. Ces épisodes mènent à la diminution des rendements et à l’augmentation des pertes lors des récoltes. Avec ces variations de températures, la qualité nutritionnelle des nutriments est impactée et les zones de production deviennent inadaptées.

Le concept « One Health » prend ici tout son sens : la santé humaine, la santé de la planète et la santé animale sont étroitement liées.

 

En route vers la nutrition durable

La nutrition dite durable est un des plus gros défis d’aujourd’hui pour diminuer notre empreinte carbone et lutter contre le changement climatique.

Des leviers d’actions existent, comme :

  • Favoriser les pratiques agroécologiques
    Agriculture naturelle, de conservation, régénérative, biologique, biodynamique, raisonnée, agroforesterie et permaculture : de nombreux modèles agricoles reposent sur les principes de l’agroécologie. Les pratiques agricoles sont basées sur la régénération des sols, la rotation de cultures, l’intégration de légumineuses pour leur fixation de l’azote dans le sol, la limitation du travail du sol et de la mécanisation.[3]

Par exemple, Biodynamic Coffee est un café issu d’agriculture régénérative.

Cette image illustre un café biodynamic de Holistic Roasters

 

  • Privilégier les produits locaux
    Le transport représente 31 % des émissions carbone de la chaine alimentaire[4]. Pour diminuer l’empreinte carbone des produits : la décarbonisation des produits peut se traduire par une production responsable et durable mais aussi par un mode de transport qui n’émet que peu de CO2. Par exemple, Grain de Sail transporte ses produits à base de chocolat et café par des voiliers. En effet, avec une tendance de relocalisation qui prend de plus en plus de place dans notre société, de nombreuses entreprises font le choix de proposer des produits locaux, fabriqués en France. Cela est le cas pour Lesieur qui développe une filière de lin 100 % française pour sa gamme ISIO4 à l’horizon 2024. La gamme « Aux fruits d’ici » de Danone contient des ingrédients uniquement issus de régions françaises. Au-delà de la diminution de l’empreinte carbone due au transport, les délais de livraison des ingrédients sont plus courts pour l’entreprise. Cependant, la production de certaines cultures nécessite un certain climat, d’où le résultat d’un volume de production moindre.

La notion de transport est certes un sujet pour décarboner notre assiette mais loin d’être le principal. La relocalisation permet surtout une meilleure maitrise des filières, un soutien des acteurs locaux, et une meilleure compréhension de ce qu’on mange pour les consommateurs.

La relocalisation a aussi ses limites :

  • Les terres agricoles disponibles
  • Le climat nécessaire pour certaines cultures et élevages et donc par extension un volume de production moindre
  • La subsistance des populations à l’arrêt potentiel de certaines cultures

 

  • Limiter le gaspillage
    En France, le gaspillage alimentaire représente 10 millions de tonnes de produits par an[5]. Le gaspillage est également un levier d’action pour la préservation de notre planète. Certaines applications comme Phénix ou Too Good To Go luttent contre ce phénomène. Too Good To Go, présente dans une quinzaine de pays en Europe, déclare avoir sauvé plus de 52 millions de repas en Europe en 2021.[6] La restauration collective a également un rôle à jouer par la limitation du libre-service et par une meilleure gestion des stocks. Des solutions voient le jour, comme :
  • La possibilité de réserver son repas afin de faciliter la gestion des approvisionnements
  • La limitation du libre-service en augmentant les distributions
  • La vaisselle et les ustensiles de services plus adaptés aux grammages
  • L’absence d’assaisonnement des entrées pour réaccommoder les surplus

 

  • Sélectionner certains emballages
    La tendance de l’upcycling a le vent en poupe. Avec un taux de croissance annuel de 122 % entre 2016 et 2021[7], de nombreuses entreprises se lancent dans la valorisation des déchets. Par exemple, Circul Egg transforme les déchets de coquille d’œuf en ingrédients pour le feed, la nutraceutique et la cosmétique.

          cette image est le logo de circul egg

Les emballages ont de plus en plus d’influence sur le choix des produits par les consommateurs. De nouvelles alternatives voient le jour : emballages compostables, réutilisables, consignes : les acteurs de l’agroalimentaire et de la nutraceutique sont incités à choisir des packagings responsables. Nat&Form, par exemple, est considéré comme un pionnier de l’emballage éco-responsable des compléments alimentaires en France. En effet, le groupe propose des piluliers en carton ou en canne à sucre.

cette image illustre des compléments alimentaires à l'ananas de la marque Nat&Form

Sensibiliser pour mobiliser autour des enjeux de climat et nutrition

En écho à l’urgence climatique, les entreprises, fabricants et distributeurs, s’engagent de manière globale. Les « petites » entreprises à l’ADN pro-environnement se multiplient. Les grands groupes, forts de leur impact, font de même. Depuis 2019, la loi Pacte introduit la qualité de « société à mission ». « Il s’agit pour une entreprise d’affirmer publiquement sa raison d’être, ainsi qu’un ou plusieurs objectifs sociaux et environnementaux qu’elle se donne pour mission de poursuivre dans le cadre de son activité ». En 2020, Danone devient la première entreprise cotée à adopter ce statut et s’engage publiquement avec le « One Planet. One Health ». En 2022, c’est le groupe Bel, déjà très engagé, qui annonce son objectif de neutralité carbone d’ici 2025. Pour ce faire, le groupe met notamment en place un outil d’analyse qui lui est propre « Bel Low Carbon ».

La marque Les 2 Vaches met en avant une communication pour limiter le gaspillage alimentaire.

On observe également l’émergence d’autres types acteurs qui démocratisent les sujets à l’instar de BonPote.

BonPote c’est :

  • Un média indépendant porté par Thomas Wagner, lanceur d’alerte sur les sujets du changement climatique.
  • La participation à la rédaction du livre Tout comprendre ou presque sur le climat
  • 122k abonnés sur LinkedIn – 140k abonnés sur Instagram – 56k sur Twitter – 55k sur Facebook

Les scores jouent également un rôle pour sensibiliser les consommateurs à l’impact environnemental des produits. Le PlanetScore et l’Eco-Score, basés sur les données Agribalyse de l’ADEME en sont des exemples.

cette image est une illustration de l'eco-score et planet score, montrant l'impact sur l'environnement et le climat du produit alimentaire

 

Le consommateur, maillon clé de la chaîne

Les consommateurs – de plus en plus nombreux – ont un rôle essentiel à jouer, façonnant la demande, créant le cycle vertueux de l’adaptation. Et nous sommes convaincus que l’éducation est essentielle pour provoquer des changements profonds de nos sociétés. Bien que « l’état d’urgence climatique » soit installé, et que nous ne pourrons pas uniquement compter sur les générations futures, il va de soi qu’il faudra passer par cette phase. Demain, les deux seront indissociables : éducation alimentaire et climatique sont interconnectées.

Cependant, le chemin est long à parcourir et prendra plusieurs générations. Prenons l’exemple des légumineuses : cette catégorie d’aliments, bien qu’historiquement consommée, n’a été intégrée dans les recommandations du PNNS que lors de sa dernière édition en 2020. Il est fastidieux d’intégrer de nouveaux réflexes, de nouveaux aliments dans les habitudes de consommation, et de populariser une catégorie de produits.

Le rôle des professionnels de santé est également prépondérant dans ces changements d’habitudes. Pourtant, ces derniers manquent généralement de formation sur le sujet de la végétalisation par exemple. Leur inculquer que oui, c’est possible d’être en bonne santé tout en étant végétarien nous paraît aujourd’hui indispensable. Demain, la notion de durabilité aussi devrait être incluse dans le cursus de formation des diététiciens par exemple.

Enfin, le sujet quasi constant est celui du prix des produits responsables.

« L’alimentation de demain sera forcément plus chère, pour un modèle plus vertueux. C’est ce qui permettra une meilleure rémunération des agriculteurs, mais aussi une meilleure qualité nutritionnelle. Cela nous renvoie à un débat de société : on ne peut en effet pas ignorer le fossé qui se creuse entre la pauvreté et les personnes plus aisées. Indéniablement aujourd’hui, la consommation responsable est élitiste. Demain, pour des aspects nutritionnels et climatiques, l’aide alimentaire jouera un rôle prépondérant. On parle déjà d’une forme de « Sécurité Sociale Alimentaire » pour, au-delà de manger, permettre de bien manger. D’ailleurs La Croix Rouge a récemment mis en place des actions pour auditer nutritionnellement les paniers fournis aux familles dans le besoin. Demain, l’audit et les actions devront aussi être climatiques. Enfin, au-delà du prix se posent des questions de conservation des aliments et de culture également. » 
Juliette Gougis, Directrice du Pôle Food, Nutrikéo

 

[1] ADEME. L’empreinte énergétique et carbone de l’alimentation en France. 2019

[2] ONU. Perspective de la population mondiale. 2019

[3] CNRS. Une agriculture biologique pour nourrir l’Europe en 2050. 2021.

[4] ADEME. L’empreinte énergétique et carbone de l’alimentation en France. 2019.

[5] Ministères Ecologie Energie Territoires. Gaspillage alimentaire. 2023.

[6] Snacking. 52 millions de repas sauvés grâce à Too Good to Go en un an. Juillet 2022.

[7] INRAE. L’agroécologie source de solutions. 2022.

 

 

— Un article rédigé par NUTRIKEO —

 

 

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