Pour des raisons écologiques, et avant tout démographiques, la part des matières 1e animales devra céder plus de place au végétal dans notre assiette. Du végétal, mais pas que… En effet, le marché des substituts de produits végétaux s’enrichit de nombreuses options et ressources alimentaires.
Mais entre l’adéquation avec la maturité du consommateur, la rentabilité des substituts et les questions de clean label, il s’agit d’un marché complexe.

 

Homme et planète : une seule santé
Nous allons devoir adapter notre façon de nous nourrir, c’est certain. Pour autant, ne voyons pas cela comme un fardeau. La santé de la planète et notre propre santé sont étroitement liées : c’est le concept One Health. En d’autres termes, ce que la planète nous intime de faire sera une évolution positive pour nous-mêmes. Cette quête de protéines alternatives (puisqu’il s’agit essentiellement de s’approvisionner en protéines) est donc lancée et il nous faut œuvrer rapidement : les changements doivent être forts et immédiats. Désormais, notre mission est de construire une nouvelle offre alimentaire moins animale, qui sera au moins aussi saine que la version précédente.
La question de la viande est centrale : notre alimentation est la 2e source d’émissions de CO2, juste après le transport[1]. Au sein de cette « brique », la viande tient la 1e place devant les boissons, puis le lait et les œufs.

Des ressources protéiques prometteuses

Pour démarrer cette quête, partons d’un 1er constat : on admet désormais que le monde végétal permet partiellement de couvrir nos besoins en protéines, après transformation ou non. En effet, de récents travaux[2] ont montré que si on prend en compte les questions nutritionnelles ET environnementales :

  • La part idéale des protéines dans notre alimentation se situe dans une fourchette relativement large de 25 à 70 % de protéines végétales pour couvrir nos besoins nutritionnels et s’inscrire dans une démarche de santé à long terme.
  • Au-delà de 80 % de protéines végétales, une supplémentation est nécessaire, ce qui laisse penser qu’un régime dénué de toute protéine animale n’est pas un idéal. Cette donnée a été confirmée par une seconde étude qui démontre qu’augmenter la part de protéines végétales améliore la santé à long terme, si elle est complétée par des apports en protéines animales[3].

 

Pour opérer ce changement, quelles sont les sources de protéines, autres qu’animales, sur lesquelles s’appuyer ?

 

  • Le végétal bien sûr. Le marché mondial des aliments à base de protéines végétales serait multiplié par 3 entre aujourd’hui et 2030 (selon Bloomberg Intelligence). Sachant que nous l’avons estimé à ~4 Mds€ en 2020[4]. Avec les céréales et légumineuses, qui peuvent être consommées brutes. Mais aussi les graines et oléagineux, la pomme de terre (malgré sa faible teneur en protéines, elle est formulée dans quelques produits finis), les champignons ou encore les microalgues. Il s’agit de l’axe le plus développé, avec des marques très connues (Beyond Meat, Impossible Burger) et des levées de fonds historiques (La Vie, Umiami).
  • La fermentation de précision ou de biomasse. En 2020, les entreprises de la fermentation alternative ont levé 837 M$.
  • Les insectes, pour lesquels la réglementation progresse à petits pas.
  • Et enfin, la culture cellulaire, qui est encore au stade de développement car non autorisée à l’heure actuelle dans la plupart des pays.

Le marché est extrêmement dynamique : quelle que soit la matière première ou la technologie, on estime à 800 le nombre de startups du meat-substitute dans le monde. Cependant, c’est une bonne et une mauvaise nouvelle : certes, cette densité booste l’innovation ; mais toutes ces entreprises ne pourront pas survivre. Selon l’investisseur Tyler Morgan, un partenaire de Boulder Food Group, qui a soutenu Meati, « le marché ne peut pas supporter 100 entreprises de viande alternative. Il peut à peine supporter autant d’entreprises de viande animale et cette industrie est 30 fois plus importante. »

 

Développer des produits finis pour toutes les catégories ?

Certaines catégories se prêtent plus que d’autres à l’exercice.

  • On l’a vu plus haut, les substituts de viande sont les plus pertinents.
  • Les substituts de produits laitiers, surtout du lait, constituent un marché bien plus ancien et donc plus mature. Les substituts de fromages, communément appelés Fomages, représentent un marché plus récent mais dont les résultats organoleptiques laissent apercevoir de belles perspectives.
  • Les substituts d’œufs répondent à des besoins de végétalisation, mais aussi d’allergies. Le marché mondial de l’œuf végétalien devrait atteindre une valeur de 2,6 Mds$ d’ici 2026, contre environ 650 millions de dollars en 2019[5]. On voit fleurir toutes formes d’œufs (durs, brouillés…) avec les marques Yo!, VegWhite ou encore Wunder Eggs.
  • Enfin, les substituts de produits de la mer, qui représentent le plus petit marché, s’agissant de produits moins consommés à l’échelle mondiale. Néanmoins, pour répondre aux besoins d’une alimentation végétarienne, et pour la préservation des écosystèmes, des startups telles que Plantish travaille sur le développement de substituts de poisson.

 

 

La question du clean label

La question de l’ultra-transformation est au centre de la table. Pour développer des substituts le plus proches possible de leur version originale (goût, texture, apparence), il est souvent nécessaire d’utiliser des additifs et autres ingrédients manquant parfois de naturel. Désormais, les autorités (l’OMS/Europe en l’occurrence) déclarent « manquer d’information sur les substituts pour pouvoir formuler des recommandations de santé publique, et donc de créer une base de connaissances nécessaire. »

Alors, quelles sont les voies pour « cleaner » les produits finis et les ingrédients ?

  • Réduire les listes d’ingrédients, comme le fait Excellent®. La startup française a développé une formulation de « steak » végétal bio, sans OGM, sans additifs et dont les qualités organoleptiques sont très proches de celles de la viande de bœuf.
  • Sourcer ou développer des additifs naturels.
  • Communiquer sur ses ingrédients: si tout n’est pas complètement clean, au moins on peut l’expliquer. Les œufs sur le plat Yo ! sont composés d’un mélange de protéines végétales, d’eau, d’huile de tournesol, de soja, de farine, “et quelques autres ingrédients simples”, tous 100 % végétaliens.
  • Des opportunités d’innovation sont également à chercher du côté des produits hybrides : combinant des protéines animales et des protéines végétales, ils répondent à une formulation moins contraignante (et qui sait, plus clean) grâce à la présence de chair animale.
  • Travailler de nouveaux process, comme le fait Heura. « Au lieu de nous concentrer sur l’extraction et l’isolement des protéines des graines de légumineuses, nous choisissons d’explorer des solutions basées sur l’exploitation des plantes toutes entières, dans leurs structures naturelles ».
  • Envisager de ne plus utiliser de sérum bovin fœtal (FBS) pour la culture cellulaire. Opalia, anciennement connue sous le nom de BetterMilk, fabrique du lait entier en utilisant des cellules mammaires et a annoncé récemment une percée qui permet d’éliminer le FBS de son processus de fabrication.

Enfin, il faut envisager de ne pas outrepasser les besoins que nous avons en produits finis, autrement dit, de les mixer avec des produits bruts non transformés (les légumineuses et les céréales essentiellement) qu’il nous faut réapprendre à cuisiner. Les autorités de santé publique alertent sur la proportion des aliments ultra-transformés dans notre alimentation et le PNNS fixe pour objectif de limiter leur consommation à 20 %.
En somme, ce sont de nouveaux usages avec lesquels nous allons apprendre à vivre et à travailler. Le meilleur est sans doute devant nous.

 


 

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