PDG de l’entreprise Le Pain de Belledonne
“J’ai toujours considéré l’entreprise comme un projet d’hommes.”

C’est une success story comme on les aime, mélange de rencontre et de hasard, de conviction et de passion, celles d’un homme, Bruno Anquetil : avec un passé déjà riche d’histoires, l’entreprise savoyarde “Le Pain de Belledonne” fête ses 20 ans dans la pleine fleur de l’adolescence avec des projets plein les tiroirs.  

D’où venez-vous ?

B.A: Issu d’un milieu agricole et élevé au cidre de ma Normandie natale, je passe mes journées à courir les champs et pêcher la grenouille. Alors que j’enchaîne un cycle inachevé dans une école de commerce puis une école d’agriculture, je prends conscience d’une autre réalité qui veille en moi : le bio m’apparaît comme une évidence, vous savez quand on se dit  … « mais oui mais c’est bien sûr ». J’effectue un stage de maraîchage en Savoie. Du jour au lendemain je décide de consommer bio, à 100%. On est au début des années 80. Le bio n’est pas ce qu’il est aujourd’hui. Moi je vire complètement et deviens végétalien. Puriste et engagé, je vends des produits bios sur les marchés.

Le pain et vous, c’est quoi ? Un coup de foudre ?

B.A: Oui et une valeur forte. Après avoir fait les marchés pendant 3 ans, acheter et vendre, je veux faire quelque chose avec mes mains. Je décide de me lancer dans la boulangerie mais en faisant tout : cultiver le blé, le moudre, faire la farine. Je me forme « sur le tas » et créée avec un associé une boulangerie bio en Picardie. Mais l’appel de l’air de la montagne est trop fort. Je pars retrouver un ami en Savoie qui a un gîte. Je lui propose de créer un atelier Boulangerie pour les groupes qu’il reçoit. C’est là que me vient l’idée de créer ma boulangerie bio.

Qui aura pour nom Le Pain de Belledonne ?

B.A: Et oui ! On est en 1991. Quelques mois plus tard, j’achète un corps de ferme. Je « vire » les vaches de l’étable pour installer mon fournil. Je fais tout, le levain, le pain à l’aube, les livraisons le matin. Je me concentre sur les magasins bios. Ça marche fort mais c’est épuisant ! En 95, après m’être déjà agrandi et avoir embauché mes premiers salariés, je me structure en créant une vraie logistique avec des « expressistes » nationaux pour assurer une livraison en ultrafrais aux 4 coins de la France. Les chauffeurs se souviennent encore de la ferme et de l’accès ! S’ils s’engageaient par erreur sur la route voisine qui conduisait au monastère bouddhiste de Karma Ling, ils devaient redescendre en marche arrière jusqu’à la route principale en frôlant les ravins. Boudha a du les protéger. Il n’y a jamais eu d’accident ! A la même époque j’élargis la gamme avec la pâtisserie et la viennoiserie.

A quand remontent les premiers vrais succès de l’entreprise ?

B.A: Dès 1996, nous sommes déjà capables de livrer quotidiennement nos produits au niveau national. Puis en 2001, les tonnages deviennent très importants. J’emploie alors 18 personnes mais les bâtiments ne sont plus fonctionnels malgré les tranches de travaux successives. De plus notre localisation en zone de montagne complique les livraisons. Je dois alors choisir : limiter la production et mon réseau de distribution ou passer à la vitesse supérieure ?

Vous n’êtes pas du genre à hésiter très longtemps ?

B.A: Non car m’engager dans des projets de construction de filières fait partie de ma logique de développement. Le challenge m’intéresse. Nous investissons 530m² à La Croix de la Rochette et mettons en place un service logistique remarquable : 5 personnes disponibles non stop pour répondre à toute question des clients avec une traçabilité d’heure en heure sur tous nos produits, dans toute la France. Je veux créer un vrai service après vente autour du pain. Le Pain de Belledonne n’est pas qu’un boulanger vendeur de pain, c’est avant tout un partenaire sur lequel on peut compter tant pour des animations, des dégustations, des PLV, du mobilier, de la sacherie gratuite.

Il y a 5 ans, l’entreprise amorce un nouveau virage ?

B.A: Oui avec deux créations : l’activité chocolaterie parce que c’est un beau produit et nous profitons d’un salarié qui a le savoir-faire. La biscuiterie, avec une proposition de biscuits boulangers pour la distribution en vrac démarre très fort. La confiserie est lancée 3 ans plus tard, en 2009, avec là encore un succès immédiat sur la guimauve. Nous mettons en place la même année une filière de commerce solidaire et équitable nord/nord. Et nous validons nos engagements de filières bio-solidaires sur le blé et le petit épeautre permettant une vraie logique de partenariat et de développement avec les producteurs locaux et régionaux sur la base de relations transparentes, sincères et équitables.

Aujourd’hui vous fêtez vos 20 ans. Que peut-on vous souhaiter pour souffler vos bougies avec les 60 personnes qui maintenant vous entourent ?

B.A: Que nos projets se réalisent ! Le premier est énorme : programmé pour janvier 2012, il nous permettra de nous installer sur 2 000 m² écoconstruit, 1400m² consacré à la production, 600 m² aux bureaux. Le géobiologue, qui a pensé le projet et étudié l’énergie des lieux, a conçu un espace unique en forme de tortue avec une harmonisation des locaux sur la base du feng-shui. Notre site actuel sera consacré à la chocolaterie et la confiserie. Avant cela nous présenterons notre nouvelle gamme à la rentrée scolaire avec 4 produits nouveaux en confiserie, et quelques petites merveilles en biscuiterie, autour du cookie.

Que sont devenus les 50 kg de pâte à pain pétris dans l’étable ?

B.A: Ils ont été multipliés par … 70. Aujourd’hui le Pain de Belledonne pétrit 3, 5 tonnes de pâte à pain par jour, et fabrique 4 tonnes de biscuits par semaine pour servir les 1500 magasins, dont 300 points de vente en direct. La gamme compte 77 références en pain déclinées à partir de 27 recettes, 13 références en biscuits, une dizaine en pâtisserie, 50 environ en chocolaterie et 7 en confiserie.

Quel est le succès de votre réussite ?

B.A: J’ai toujours considéré l’entreprise comme un projet d’hommes. L’humain tient une place essentielle : chacun doit y prendre sa place, s’intégrer au projet, partager ses ambitions et retrouver le sens de soi. Nous ne dérogeons pas au credo de l’entreprise : « Nous nous engageons dans une démarche constante de progrès au service de la qualité, de l’environnement et de l’humain ». Nous accompagnons véritablement le client.